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Suppression de la redevance, la démocratie mise en péril

Moins de taxe, oui, mais à quel prix ?

Les missions premières de l’audiovisuel public sont « d’informer, éduquer et distraire tous les citoyens ». Dès octobre, les Français possédant une télévision n’auront plus à s’acquitter des 138 euros annuels de la redevance, qui financent France Télévisions, Radio France, RFI, France 24, l’INA et Arte, mais aussi, à travers ces groupes, la création culturelle et artistique.

« C’est une mesure de pouvoir d’achat pour 23 millions de Français », a déclaré la ministre de la Culture.

Un possible danger : une privatisation des médias publics

Rien ne permet d’assurer aujourd’hui que l’audiovisuel public sera à l’abri de futurs arbitrages budgétaires et des changements de majorité. Les conditions seraient alors remplies pour appliquer la proposition du RN de privatiser cet outil indispensable à la démocratie.

Le modèle allemand souhaité par les acteurs français de l’audiovisuel public

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La redevance était une taxe qui permettait de garantir un financement stable et pérenne. Les syndicats souhaitaient la mise en place d’une taxe universelle sur le modèle allemand, qui concernerait tous les citoyens et non plus seulement ceux équipés d’une télévision. Effectivement, le contenu des médias publics est aujourd’hui accessible sur tous les supports. Ce système serait cependant progressif et n’impacterait pas les ménages modestes.

L’indépendance de l’audiovisuel public : un enjeu culturel

La fin de la redevance par le gouvernement oblige l’État à financer directement les médias concernés, qui craignent un interventionnisme plus marqué.

Cinéastes, écrivains, producteurs dénoncent une mesure qu’ils considèrent comme une menace directe pour l’indépendance de l’audiovisuel public et le financement de la création.

Albert Camus a écrit : « Tout ce qui dégrade la culture raccourcit les chemins qui mènent à la servitude. ».

Pour aller plus loin, le point de vue d’une économiste politique, Julia Cagé, et son livre Sauver les médias.

Le danger pour la démocratie expliqué par une économiste politique

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L’économiste Julia Cagé s’est fait connaître en 2015 pour son livre Sauver les médias.

La redevance télé supprimée, elle démontre, dans un rapport pour la Fondation Jean-Jaurès, le danger d’un sous-financement de l’audiovisuel public. Une manœuvre très idéologique, voire perverse, selon elle.

Elle plaide depuis des années contre la concentration des médias dans les mains de quelques oligarques.

L’économiste politique Julia Cagé a écrit : « Une autre redevance est possible. Pour un financement affecté mais plus juste de l’audiovisuel public ».

Dans les pays avec un audiovisuel public de qualité, les gens sont en moyenne mieux informés et participent davantage au débat politique et à la vie publique. C’est largement documenté par la sociologie, l’économie et les sciences politiques.

La redevance, une taxe désuète qui devait être réformée

La redevance ne correspondait plus aux besoins de consommations du service public, puisqu’elle ne porte que sur les détenteurs de téléviseurs. Alors que de plus en plus d’individus consomment les contenus audiovisuels sur leur tablette ou leur téléphone portable.

Surtout, c’est un impôt profondément injuste, car le montant est le même pour tout le monde. Il fallait la réformer. Le gouvernement a repris une idée poussée par l’extrême droite depuis longtemps, celle de la privatisation du service public : plus de service public, plus de redevance.

Le modèle allemand et des pays nordiques

En Allemagne, la « taxe injuste » a été élargie à l’ensemble des écrans. Et pour en assurer l’indépendance, la redevance est collectée par un organisme qui dépend des chaînes de l’audiovisuel public. Ce n’est pas l’État qui peut décider du jour au lendemain de s’asseoir sur les budgets prévus, comme en France.

Encore plus intéressant, les pays nordiques : la Finlande en 2010, la Suède et la Norvège entre 2019 et 2020 ont remplacé la redevance par un impôt qui pèse sur l’ensemble des foyers, mais de manière progressive.

Conclusion : une dérive inquiétante

Le délaissement de l’audiovisuel public n’est pas une exception en Europe. Dominique Pradalié, présidente de la Fédération Internationale des Journalistes (FIJ), dénonce une « volonté de détruire l’audiovisuel public » pour garantir une « unanimité de discours qui permet toutes les censures et pressions ».

La fin de la redevance, le début d’une ère tyrannique en France ?

Sources : humanite.fr │ lemonde.fr

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