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La reconstruction par le sport #1

Interview exclusive de Marie Garrot, fondatrice et présidente de l’association Helpiti

Les liens entre une bonne santé mentale et la pratique d’une activité physique ne sont plus à établir. En effet, de nombreuses études ont été menées sur le sujet sur les dernières années, et depuis deux ans, de nombreuses initiatives voient le jour, en fixant un seul objectif : le mieux être.

Finies les tendances des Top Body Challenge, ou autres noms, qui promettaient sous 28 jours, un corps de rêve et un mental d’acier. Nombreuses personnes ont effectivement tenté, sans succès sur le moyen ou long terme, ce type de programme express pour lutter contre la solitude imposée par les confinements successifs de la COVID-19.

Un concept pas si nouveau

La reconstruction par le sport en France prend ses origines principalement avec la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le but à cette époque est alors de reconstruire une nation saine, capable et responsable. Les autorités estiment qu’il faut occuper les hommes détruits par les horreurs de la guerre, et dont beaucoup ne peuvent plus travailler.

Ainsi, les années qui précèdent les Jeux Olympiques de 1960 à Rome ont permis d’ancrer la reconnaissance de l’activité physique avec la reconstruction des anciens militaires.

À ce jour, la population militaire reste un public particulièrement actif dans les épreuves de reconstruction par le sport. Les Invictus Games, créés par Harry de Sussex en 2014, en sont la preuve. Cette année-là, plus de 400 anciens militaires, venus des quatre coins du monde se sont rassemblés à Londres pour cette compétition multisports. L’ancien “prince” Harry permet également l’ouverture d’un sujet tabou : les traumatismes psychiques laissés par les déploiements en milieux de guerre. Tous les quatre ans, une édition est ainsi renouvelée.

D’autres publics cibles

L’ère Me Too passée, la société s’est enfin intéressée à la reconstruction d’autres publics : rémission de maladies physiques (cancer, leucémie…) mais aussi mentales (troubles psychologiques, dépressions, troubles alimentaires…).

Les personnes victimes de violences sexuelles, longtemps laissées recluses dans leurs souffrances, ont pareillement pu trouver une porte d’entrée avec la création (ou une meilleure visibilité) d’associations, spécialisées dans la reconstruction par le sport.

Nous avons d’ailleurs rencontré Marie Garrot, fondatrice et présidente de l’association lyonnaise de loi 1901, Helpiti pour échanger autour de ce sujet.

Marie, peux-tu décrire en quelques mots ton parcours et la raison d’être de l’association ?

J’ai 43 ans et trois enfants. J’ai toujours pratiqué le sport, sauf lorsque j’ai emménagé en grande ville. De plus, à ce moment, j’ai traversé une période difficile, et pour pallier anxiolytiques, ma psychologue m’a proposé de choisir un sport. J’ai alors démarré la course à pied en 2018 et commencé mes premiers raids.
Helpiti est né suite à ma participation au Raid Amazones en 2019, où je croisais beaucoup de femmes qui soutenaient diverses associations afin de se reconstruire pour des problèmes ou maladies physiques, mais surtout le cancer du sein. Pour ma part, j’étais concernée plutôt par les psychotraumatismes, car j’ai été violée et j’ai dû me sortir de réseaux pédocriminels dans ma jeunesse.
À mon retour du Raid Amazones, Helpiti était créée, avec le souhait de ne pas faire de distinctions de pathologies ou de vécu.

Comment pourrais-tu expliquer à une personne novice, le principe de reconstruction par le sport ?

C’est très simple. Le sport aide à apprendre à se connaître, à sortir de chez soi, et à se surpasser. Grâce au dépassement de soi, on se rend compte que nous sommes capables, grâce à notre corps et notre mental, d’accomplir beaucoup de choses. Ce n’est pas miraculeux, et cela prend du temps, mais chaque petit effort permet une reprise de confiance en soi.

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Tu participes au HMDS et tu emmènes avec toi des femmes en reconstruction physique ou psychique. Peux-tu nous en dire davantage ?

Tout le monde en est capable. J’ai fait le HMDS en 2021 et j’ai pu constater la diversité des profils. C’est une aventure humaine avant tout.
Cette année, Helpiti permet à 8 femmes de partir en novembre en Jordanie. Elles portent toutes un bagage psychique ou bien physique, et je veux leur prouver qu’elles en sont capables.

Quels sont tes objectifs sur le moyen terme pour Helpiti ?

J’aimerais avant tout pérenniser l’association, et construire un réseau de femmes qui s’entraident. De mon côté, je rêve de construire mon propre raid et d’emmener avec moi toutes ces femmes !

Les personnes que tu as pu accompagner sur des épreuves renouvellent-elles l’expérience ou s’investissent-elles différemment dans l’association ? Quels retours sur l’amélioration de leurs états as-tu pu avoir ?

J’ai encore des contacts avec toutes les filles, pour savoir ce qu’elles deviennent et parce que les liens créés sont forts. Elles ont toutes adoré le concept, et sur le principe, sont toutes partantes pour repartir. Ce sont souvent les moyens financiers qui les freinent. En effet, le but d’Helpiti n’est pas d’offrir des voyages. Nous les aidons déjà financièrement, en les conseillant, mais la reconstruction passe également par la participation, même financière, à son soin global.

Comment aides-tu les participants à financer leurs épreuves ? As-tu des partenaires privés ou publics ?

J’ai demandé des subventions à la ville dans laquelle j’habite qui est aussi le siège de l’association (Charbonnières les Bains, près de Lyon). J’ai essuyé des refus que j’ai du mal à comprendre. Généralement, les subventions sont attribuées à des associations déjà fortement connues, ce qui ne permet pas à celles qui souhaitent se développer, de le faire pleinement. Heureusement, nous avons des partenaires privés, qui croient réellement en notre projet et nous aident à avancer.

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Sources : cairn.info │ hmds.com │ helpiti.fr

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