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The Line : le projet fou d’une ville du futur

The Line, nouvelle ville futuriste dont le projet est en cours d’élaboration en Arabie saoudite…

L’annonce de “The Line”

Le prince héritier Mohammed Ben Salmane a annoncé officiellement dans un communiqué de presse, le 25 juillet 2022, la concrétisation du projet The Line :

“THE LINE s’attaquera aux défis actuels de la vie en milieu urbain et mettra en lumière d’autres modes de vie. Nous ne pouvons pas ignorer les crises de l’habitabilité et de l’environnement auxquelles sont confrontées les villes du monde entier. NEOM est à l’avant-garde de l’élaboration de solutions nouvelles et créatives pour résoudre ces problèmes. NEOM dirige une équipe composée des esprits les plus brillants de l’architecture, de l’ingénierie et de la construction pour concrétiser le concept de construction verticale.”

Neom est un projet de ville nouvelle futuriste située dans la province de Tabuk dans le Nord-Ouest de l’Arabie saoudite. À cela s’ajouterait le site de Trojena dans les montagnes, choisi pour accueillir les 9ᵉ jeux asiatiques d’hiver en 2029.

Ce projet s’inscrit dans le cadre du plan de vision 2030 de l’Arabie Saoudite. C’est un plan de développement mis en place en 2016 visant à diversifier l’économie du pays en dehors de sa présence dans le monde pétrolier.

Une ville qui vend du rêve ?

D’une architecture détonante par sa forme et son aspect de miroir, The Line, ou autrement dit la ville à la verticale, mesurerait 500 m de haut, 200 m de large et 170 km de long. Tout cela pour une superficie finale d’environ 34 km². La ville aurait une capacité de 9 millions de résidents, soit 260K de personnes par km². Il s’agirait de la ville la plus dense du monde.

Prévue pour être organisée en trois couches (étages), chaque habitant aurait accès en moins de 5 min à toutes les infrastructures de la ville (bureaux, magasins, loisirs, résidences, santé, culture, éducation…). Cela permettrait à chacun de maintenir une bonne balance travail/vie quotidienne.

Par ailleurs, The Line serait supposée offrir à chacun un accès continu et immédiat à la nature. Cela serait possible grâce une grande diversité d’espaces ouverts suspendus. On pourrait y voir le paysage naturel environnant avec des montagnes, du désert côtier ainsi que la vallée supérieure. Ce sont les trois régions parcourues par The Line.

Les transports en commun seraient quant à eux situés dans la 3ᵉ couche, souterraine. On y trouverait des trains semblables au principe de l’Hyperloop d’Elon Musk, permettant d’aller à un bout à l’autre de la ville en 20 min.

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Quels en sont les buts ?

The Line est vendue comme un projet de ville réparatrice. Neom se concentre majoritairement sur trois domaines : la nature, les personnes et l’économie.

Concernant la nature, l’architecture verticale de la ville serait équivalente en empreinte au sol à 2 % des villes conventionnelles. Tout cela dans le but de préserver 95 % des terres aux alentours. L’élimination des routes et des voitures (infrastructures à fortes émissions en carbone) devrait permettre à The Line de n’avoir aucune émission de CO2 à son actif. La ville tournerait exclusivement aux énergies renouvelables (solaire, éolien, hydrogène).

De plus, cette dernière permettrait d’améliorer le système urbain pour favoriser la santé et le bien-être de ses habitants. Dans un premier temps, en privilégiant une communauté proche (80k de personnes aux alentours de soi en moins de 6 min), dont l’entourage et la famille. Puis dans un second temps, en promouvant le meilleur équilibre possible entre la lumière, l’ombre et la ventilation naturelle. Ce peut être créé par les nombreux espaces ouverts de The Line.

Enfin, au niveau de l’économie, The Line est basée sur le principe du savoir. La ville veut développer l’éducation, la recherche et l’innovation. Cela dans le but de former des individus autonomes. Ils seraient capables de rassembler leurs talents pour accélérer la réussite de l’économie du futur.

Sa position stratégique lui permet de se situer à moins de 6 heures d’avion de 40 % du reste du monde. À savoir par ailleurs que 13 % des échanges mondiaux passent par le canal de Suez.

Des réactions mitigées

Cependant, ce projet, qui vend du rêve, est fortement critiqué.

En premier lieu, Philip Oldfield (enseignant-chercheur à l’Université de Nouvelles-Galles du Sud) soutient que l’empreinte carbone du projet s’élèverait à 1,8 gigatonne de CO2. Cela à cause de la création du verre, de l’acier et du béton nécessaire à la construction d’un tel bâtiment. De plus, ces ressources gigantesques supposées intervenir dans cette dernière ne sont pas présentes sur place. Il faudrait donc réfléchir pour minimiser l’empreinte carbone de toutes ces importations, voire extractions de matériaux.

Ensuite, l’architecture de la ville, bien que rappelant celle des villes futuristes dans le cinéma, pourrait devenir en réalité un véritable obstacle aux écosystèmes environnants.

En effet, selon le géographe Alain Musset, cela donnerait lieu à une grande barrière pour les espèces environnantes, mais également celles migratrices. La façade extérieure en miroir représenterait un véritable danger pour les oiseaux. En effet, c’est l’une des grandes routes migratoires passe par la mer Rouge.

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Ce dernier a par ailleurs soulevé la question de l’accès à cette ville. Elle risquerait alors de marquer davantage les écarts entre les populations aisées et ceux vivant en difficulté.

Enfin, ce projet fait énormément polémique dû au non-respect des droits de l’Homme dans sa création. La région de construction du site est aujourd’hui habitée par certaines tribus. En octobre 2022, 3 habitants de la tribu des Howeitat, vivants donc à proximité du site, ont été condamnés à mort. Neom leur aurait en effet demandé de quitter leur village dans le cadre du projet. Ceux-ci auraient choisi de refuser. Ce ne sont pas les premiers cas de ce genre. Certains habitants de cette même tribu ont déjà été auparavant tué ou condamné à de la prison après avoir cherché à s’opposer à « The Line ».

Le mot de la fin

The Line est considérée comme un projet innovant et futuriste pour certains. Mais, les paradoxes et bilans fortement négatifs engendrés par sa construction et sa création montrent bel et bien qu’un tel projet apparaît aujourd’hui comme une réelle illusion venant de l’Arabie Saoudite.

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